Au sein du Formule 1 de Beaucouzé, réquisitionné par la préfecture durant le confinement, le bien vivre ensemble s’est mis en place entre les 130 résidents aux parcours de vie cabossés.
« Ah tu l’as retrouvé ton sourire ! »
En ce dimanche ensoleillé de fin avril, Olivier chambre gentiment Sylvie, logée depuis peu à l’hôtel Formule 1 de Beaucouzé. « Oui ! Et heureusement car une Québecoise qui ne sourit pas, c’est grave ! », rétorque-t-elle, hilare.
La Canadienne a recouvré toute son énergie. Celle-là même avec laquelle elle avait débarqué en France le 6 mars pour découvrir le pays durant six mois. Mais la pandémie du Covid-19 est passée par là et a rebattu ses plans. « Je ne vais pas revenir sur mon histoire mais ce que je peux dire c’est que je suis très chanceuse d’être ici maintenant. J’ai été très bien accueillie. »
« Personne ne juge les autres »
Accueillie par Bruno Vérité, le directeur de l’établissement depuis mars 2018. Un homme soucieux de mettre du baume au cœur dans la vie de ces gens en situation de précarité. Si son hôtel a été réquisitionné pour accueillir des sans-abri durant ce confinement, ce n’est pas un hasard. Depuis août 2019, il consacre tout un couloir pour les hébergements d’urgence : « Je reçois des familles en difficulté, des femmes et leurs enfants, des personnes seules, des gens en attente d’une carte de séjour… »
Actuellement, l’hôtel affiche complet, quelque 130 personnes étant logées dans les chambres de 9 m². Une dizaine de nationalités, des religions diverses, des parcours variés… Un véritable melting-pot d’où se dégage une belle unité. « Il existe une sorte de bienveillance collective », apprécie Stéphane Lepage, secrétaire départemental du Secours populaire.
« Il y a une belle harmonie, un respect. Ici, personne ne juge les autres », corrobore Olivier, stoppé dans sa recherche d’appartement par le confinement. « Tout le monde a le sourire, des amitiés se créent, ajoute Sylvie. Les gens s’écoutent. » Et ils coopèrent, participant à la vie de l’hôtel, prenant soin des lieux.
Impliqués dans la vie de l’hôtel
Une véritable organisation s’est même mis en place sous la houlette notamment d’Anna, Géorgienne de 35 ans. Hébergée avec son mari et ses trois enfants, elle est très reconnaissante à l’égard de « monsieur Bruno », le directeur de l’hôtel, et des bénévoles œuvrant pour leur cuisiner et apporter des repas. « Il y a beaucoup de solidarité autour de nous. Je voulais aussi aider à mon tour, je ne peux pas rester en place à attendre. » Recenser les besoins de chacun, procéder à l’appel pour la distribution des repas font partie de ses tâches quotidiennes.
Tout comme Olivier, membre de « l’équipe » des petits-déjeuners offerts par la direction et livrés aux portes des chambres : « Mon grand bonheur, c’est de voir la joie des enfants quand la porte s’ouvre […] Par mon action, par un sourire, j’essaie de donner de mon cœur. C’est ça la première monnaie, ce n’est pas l’argent. »
Au sein de l’établissement, le confinement se déroule donc quasi sans fausse note, dès lors que les règles sont bien respectées : pas d’alcool, pas de bruit après 22 h, etc. « Et si un litige survient, on intervient de suite, explique Bruno Vérité. Le problème se résout naturellement, par le dialogue. » Certains comme Anna ou Yacine peuvent notamment remplir le rôle d’interprètes.
« Tous ensemble, nous sommes une grande famille », aime d’ailleurs à rappeler la maman géorgienne. « Quand tout est fait avec amour, la magie opère, les gens se comprennent, conclut Olivier. Tout le monde a envie de respecter cet endroit car c’est là qu’ils peuvent se ressourcer. »